Le diable ne vit pas dans l'Amérique profonde, il ne fait qu'y chier
Quand mon vieil ami Dickie Holme m'a dit que la bonne noire, Vernie, qui l'a élevé pendant que sa famille était occupée à voler la moitié du comté, cuisinait toujours le dîner de Noël chez lui chaque année, j'ai presque craché ma vodka tonic sur le devant de sa chemise de badminton Yonex.
Djizus Christ, Dickie, elle a quatre-vingt ans et une famille a elle pour célébrer Noël.
L'esclavage est fini en Virginie depuis vingt ans maintenant. T'as pas eu la note ?
Vernie cuisine toujours les huîtres de Noël
, dit-il, elle ne voudrait pas les voir mal préparées.
On va la chercher et on la ramène.
Maintenant, Dickie n'est pas un gars cruel. Loin de là. Il est si bien élevé et châtié que la plupart des gens au premier regard, ici sur la terre du tabac à priser et des camions délabrés, se figurent que c'est un pédé. Ce qu'il n'est pas, malgré ses chevilles nues, ses mocassins à pompons et ses airs efféminés. Beaucoup de riches Sudistes ont l'air de pédés. C'est juste un style.
1. La grande dépression économique de 1929.
Les deux côtés de sa famille sont depuis longtemps des gens qui ont le bras long, des Sudistes qui baignent dans le beurre. Le butin tribal prend sa source dans le vol de terre durant la Dépression1, quand son arrière-grand-papi a habilement viré les fermiers du terrain en procédant à l'achat de bois de construction pour sa scierie. Les trois générations suivantes ont parachevé leur richesse en concluant des affaires en dessous de la table au conseil municipal et aujourd'hui ils sont les plus gros investisseurs du comté. Un truc classique du sud.
Bon, de toute façon... je suis assis là à regarder un gars que je connais depuis des années, une personne dont je n'ai jamais réussi à apprendre quoi que ce soit de nouveau, quand je réalise : ce mec ne comprendra jamais !
Il ne comprendra jamais pourquoi Vernie pourrait avoir préféré ne pas passer les quarante derniers Noëls chez lui, dont les dix derniers sans même être employée.
En quand je lui rappelle les implications sociales et politiques, il dit que Vernie n'a jamais eu une pensée politique de sa vie
.
Bien sûr, la raison principale pour laquelle Vernie va boiter là-bas à Noël est la femme de Dicko.
C'est l'une de ces beautés sudistes de droite, garces psychopathes qui n'ont jamais pu se faire à l'idée de ne pas posséder d'esclaves.
Ces temps-ci les domestiques noirs sont de la première importance par ici, étant donné que peu de Noirs se soucient ou ont besoin de ramper pour récurer le sol de maît'esse avec une se'pilliè'e.
Et si vous en trouvez un qui veut bien, ça va vous coûter un billet par jour, parce qu'il y a bien assez de boulots pour les Noirs là-bas à Washington DC.
Alors avoir Vernie pour Noël montre que la garce n'a pas à se résigner au Mexicain à quarante-cinq-dollars-par-jour.
Non M'sieur !
Toutes les familles friquées font un spectacle de leurs domestiques noirs, surtout les vieux domestiques noirs qui sont avec notre famille depuis toujours
.
La classe de Dickie, affairiste et possédante, est congénitalement incapable de piger que les masses aussi font partie de l'histoire politique. Ces gens de la classe possédante ne sont pas méchants, ou du moins pas intentionnellement, ni stupides. Ils vivent seulement leur vie comme ils l'ont toujours vécue — comme une classe qui possède le pays et le loue au reste d'entre nous. Et ils nous voient exactement comme ça, un essaim sans visage à exploiter et gérer à profit. Les banquiers de sa classe possédaient les fesses de mon père, et je ne veux même pas penser aux façons dont Dicko possède probablement les miennes indirectement à travers les institutions financières locales.
2. Dell est une marque d'ordinateur.
3. Si en France l'expression sécurité sociale
se confond avec la Sécurité Sociale
au point d'être circonscrite aux questions d'assurance santé, elle a conservé dans le monde anglophone son sens général, c'est à dire qu'en plus de l'assurance santé elle englobe les questions d'assurance vieillesse et d'assurance emploi.
En ce qui concerne la Social Security Administration américaine, c'est un organisme fédéral dont l'objet est le versement des pensions de retraite, de veuvage et de handicap.
Elle participe aux programmes d'assurance santé en tant qu'interface avec les assurés, bien que ces programmes ne ressortent pas de sa responsabilité.
La classe affairiste et possédante a toujours été institutionnalisée comme l'état et les gardiens du processus social et politique américain tout entier.
L'histoire que nous apprenons à l'école est la version des possédants, telle qu'ils la voient.
Malgré ce que l'on nous enseigne, la Constitution des États-Unis elle-même est principalement un document de droit de propriété, et ceux qui possèdent le plus sont naturellement en ascension à toutes les époques dans ce pays.
Cela, génération après génération, devait nous mener à un orgueil dangereusement démesuré tel que la société de propriété
de George Bush, dans laquelle chacun a son propre logement mobile, sa dette de carte de crédit et un Dell2... sans parler du rétablissement de l'emprisonnement des débiteurs et des maisons de pauvres à travers la réforme de la faillite
et la réforme de la sécurité sociale3
.
Comment aurait-il pu en être autrement ?
Alors il n'est pas étonnant que lorsqu'ils font face à une véritable résistance de parties du monde hors de portée de leur système de propriété égoïste, que ce soit le Vietnam ou le Moyen-Orient, ou le mouvement mondial contre la guerre en Irak, ils sont stupéfaits. Dickie et son assortiment d'élite sont absolument babas. Ils n'ont pas une miette de moyen concret ou intellectuel pour saisir ce qui se passe. (Et pour ceux qui vont sûrement dire que j'excuse les riches, laissez-moi vous rappeler que, en tant que beauf authentique et inné, il est bien plus probable que je tire un jour dans leur cul de débiles ineptes que vous. C'est dans mon sang, bien que j'arrive à me retenir.)
4. Lynndie Rana England est une femme soldat accusée d'avoir exercé des sévices physiques et psychologiques contre des prisonniers irakiens à la prison d'Abou Ghraib. Elle est née dans le Kentucky et a grandi en Virginie occidentale. Elle s'est engagée comme réserviste lorsqu'elle était lycéenne. Avant d'être envoyée en Irak elle était caissière dans un supermarché.
En tout cas, les élites locales et nationales faisaient de l'argent goulûment, sans qu'aucun ne fasse une honnête journée de travail depuis des générations... et puis boum !
Le 11 septembre.
Ils lévent les yeux de leur cognac et, oh mon dieu !
Des essaims de païens poussiéreux et trempés de sueur sont dans le périmètre !
Et le monde entier regarde l'Amérique avec outrage et même les Européens dont on a sauvé le cul pendant la Seconde Guerre mondiale deviennent insolents.
Y'a rien d'autre à faire que de lancer les armées, se déployer à travers la face de la planète, s'équiper de plus de bases et de prisons et de réseaux de renseignement et faire parler tout le monde.
L'argent du monde des affaires soutenu par le poing des marines ça a marché toute leur vie, et toute la vie de leurs parents, et toute l'histoire moderne de l'Amérique.
Pourquoi ça s'arrêterait de marcher maintenant ?
Lynndie4, braque donc la gégène à couille sur ce gamin irakien ; peut-être qu'il peut nous expliquer ce qui se passe.
5. Il est indispensable lorsqu'on lit des textes politiques américains de garder à l'esprit que le mot liberals
y désigne, à l'inverse de l'usage français actuel, des gens de gauche.
En revanche, les gens que nous appelons libéraux
ou ultra-libéraux
sont en Amérique des neo-conservatives
(parfois abrégé en neo-cons
).
L'usage américain a été transposé ici car il rend une meilleure justice à l'étymologie.
De plus, l'appellation neo-cons
a aux oreilles françaises des résonances si flatteuses que nous pourrions bien finir par l'adopter.
6. Des membres du Kiwanis club.
7. Des membres du Rotary club.
8. Wal-Mart est la plus grande entreprise de distribution du monde, et le plus gros employeur privé aux États-Unis.
9. En français dans le texte.
D'accord. Alors les vraiment riches ne comprendront peut-être pas. Mais les serpents les plus dangereux, ceux au niveau juste en dessous de Dicko — les petits qui mordent à la cheville pour essayer d'avoir une plus grande part dans l'action — ils ne comprennent que trop bien. Ou du moins au point de comprendre que les masses ont besoin d'être brutalisées de temps en temps. Remises à leur place. Maintenant, je ne parle pas du barbier ou du coiffeur à trois fauteuils, ou de l'épicier au bout de la rue. Je parle des agents immobiliers, des avocats et des grossistes prêts à coopérer à tout ce qui permet de détruire l'aménagement du territoire et le code de l'urbanisme, casser les syndicats et garder les salaires bas, les loyers hauts, les libéraux5 en minorité et les bronzés dehors. Ces gens des professions indépendantes ou semi-indépendantes, conservateurs de second rang, sont bien décidés à être les vrais acteurs un jour. Dans leur ascension de l'échelle sociale ils vous entuberont et vous feront supplier pour avoir votre rendu de monnaie.
Les villes petites et moyennes d'Amérique sont gouvernées entièrement par leur classe affairiste, ces innombrables petites bougies de la machine capitaliste marchande américaine. C'est là que le vol institutionnalisé par les riches sociétés trouve son appui et son soutien. En fonction dans chaque corps politique local, cette pègre de kiwanis6 et de rotariens7 est interconnectée, et collectivement elle peut obtenir le reclassement de ces quatre-ving-dix hectares pour Wal-Mart8 ou un tronçon d'égouts pour ce projet immobilier de deux-mille logements, aux frais du contribuable. Quand il s'agit de faire avancer les choses localement pour les gros, ces gens peuvent guérir le malade, relever le mort et rendre la vue à l'aveugle. Ils sont le cadeau divin aux grandes compagnies sans syndicats et aux usines de puces électroniques cherchant une nouvelle rivière pour y pisser du cadmium — les garçons entreprenants du Rotary, du Lions ou du Kiwanis club. Ce qui les rend spécialement dangereux c'est qu'ils sont politiquement actifs, et ont un effet cumulatif sur le corps politique9 national.
10. Outback est une chaîne de grills américaine dont les établissements ont un décor australien
(boomerangs, kangourous, etc.).
Comme l'endroit d'où j'écris, Winchester en Virginie, de nombreuses villes de l'Amérique profonde sont des petits systèmes féodaux gouvernées par les réseaux locaux de familles friquées.
C'est une part de la vie de notre communauté que vous ne pouvez pas voir depuis la route ou de votre chambre d'hôtel et qui n'apparaîtra certainement pas dans la brochure touristique pour la Winchester historique.
Il est dans l'intérêt de ces rupins conservateurs provinciaux de maintenir un État avec des contributions faibles, peu ou pas de réglementation locale, pas de syndicats, un système éducatif au rabais et une chambre de commerce avec le sénat de l'État entier dans le répertoire de ses téléphones.
En même temps ils contrôlent les mandats électifs locaux et les conseils municipaux.
Après des générations à gratter les pains de savon dans l'arrière-boutique et à faire détremper les côtes de porc pour leur donner du poids sur la balance, ces petits connards insensés ont vraiment conquis le débat politique et économique (qui n'en font qu'un car en Amérique la politique est simplement le système utilisé par les riches pour gérer leur argent).
Comme dans : On s'en fout du ruisseau pittoresque et du vieux champ de bataille historique, le gouvernement municipal dit que vous aurez un grill Outback10 !
.
Malgré les apparences, le diable ne vit pas à Winchester en Virginie.
Il ne fait que chier ici.
11. Dans le texte : MBA (Master of Business Administration).
Au delà de tout ça, je ne cesse jamais de m'étonner de voir à quel point ces rupins néo-conservateurs accomplis au niveau local peuvent être si totalement ignorants.
Un homme d'affaire de ma ville, je vais l'appeler Jim Dawkins, est rentré d'un voyage en Europe et, sachant que je suis un gauchiste à double fondement en fer coulé, m'a apporté un exemplaire d'un journal socialiste.
Il me l'a donné pour plaisanter, et m'a dit :
Mec !
Tu arrives à croire qu'ils autorisent la publication de ce genre de choses là-bas ?
On a des lois contre ces merdes là dans ce pays.
Je lui ai rappelé que nous n'avons pas de telles lois et que le Parti Socialiste est probablement le plus grand parti politique de la planète.
Oh, c'est des conneries !
, dit-il.
Alors bon Dieu, quel est le plus grand parti à ton avis ?
Il m'a répondu :
Le Parti Républicain.
Nous sommes le seul pays avec de vrais partis
Maintenant, ce type a un diplôme de commerce11, un mandat local et de l'influence dans les affaires publiques du coin.
Bon Dieu, qu'est-ce qui passe pour de l'éducation dans ce pays ?
Dans quelle genre de bulle vivent ces affairistes américains ?
Quoi qu'il en soit, des personnages comme Dicko et Jimmy Dawkins vivent sur la tête de millions de travailleurs pauvres.
12. James Riddle Hoffa fut le président du puissant syndicat des camionneurs dans les années 60, au sein duquel il entretenait des relations avec la mafia. Condamné pour tentative de corruption en 1967, sa peine fut commuée en 1971 par le président Nixon. En 1975 il disparut soudainement et son corps ne fut jamais retrouvé.
13. Gunsmoke était un western en feuilleton, diffusé à la radio à partir de 1952 puis à la télévision jusqu'en 1975.
Mon père est mort avec certaines de ces marques de talon sur la tête. Pendant une grande partie de sa vie il a fait tourner un garage pompe à essence pour un petit patron. Il était fier de son art, et doué. Il travaillait douze heures par jour, six jours par semaine couché sur une planche à roulette, à décrasser des fosses de graisses, en vivant de sandwichs. Il n'a jamais bu — il n'a jamais eu les moyens de commencer — et il craignait un dieu fondamentaliste. Il vous bottait le cul si vous essayiez de piquer un truc, et vous emmenait pècher toute la nuit sur la rivière Shenandoah. Papa croyait que Jimmy Hoffa12 était la preuve que tous les syndicats sont pourris, et il adorait manger de la glace directement dans le carton quand il sortait du travail tard le soir. J'avais l'habitude de me glisser en bas dans mon pyjama, me blottir contre lui, et regarder Gunsmoke13. Il a eu sa première attaque cardiaque vers la quarantaine, et a toujours vécu endetté envers les docteurs et les hôpitaux ensuite. Il n'a jamais eu d'assurance santé jusqu'à ce qu'il finisse à la Sécurité Sociale. Les petits propriétaires pour lesquels il travaillait sont devenus très aisés grâce à ses efforts incessants pour gagner des amis et des clients et faire un travail parfait — pour cinquante-cinq dollars la semaine. En 1963. Pourtant il faisait confiance au système et acceptait tous ses ennuis comme un échec personnel. Il a eu de sacrément grandes funérailles, les plus grandes qu'on ait jamais eu dans son église. Ce qui je suppose, compte pour quelque chose. Je l'espère. Parce qu'il est sacrément sûr qu'il n'a jamais rien reçu d'autre pour ses ennuis dans cette vie.
14. Tyson Foods est la plus grande entreprise de viande de poulet, de bœuf et de porc du monde.
Comment dans ce bon Dieu de monde, nous les Américains, avons nous pu en arriver à la notion qu'un tas de vendeurs de cornichons du centre-ville, de pompistes et de branleurs immobiliers — des gens qui connaissent le prix de tout et la valeur de rien — étaient le fondement de notre démocratie ?
Qu'ils étaient un indicateur de ce qui est bon pour l'Amérique ?
Et bien, ce n'est pas nous évidemment.
Ce sont les vendeurs de cornichons, les politiciens et les sociétés qui possèdent le Congrès.
Une fois qu'il a été découvert quel merveilleux générateur de boulots à bas salaire, non-syndiqués, jetables, à temps partiel et non-assurés ces petites boites à sueur étaient, et que n'importe quel boulot compte statistiquement (même un boulot de vingt heures par semaine à scier des truies mortes gonflées dans une case de mise bas pour une paye minimum, que j'ai occupé une fois) leurs propriétaires ont été considérés comme les puissants moteurs de la croissance de l'emploi !
Le cœur battant de notre moteur économique !
Alors Wall Street prend un envol étourdissant à l'annonce de milliers de licenciements et : Hé ho, hé ho, nous allons au boulot
à la franchise Tyson14 locale juste pour percer des dindes, pour un salaire minimum, avec un Salvadorien qui n'arrête pas de regarder par dessus son épaule à cause des services d'immigration, qui ne viendront jamais car il y a un arrangement avec le propriétaire.
Quand est-ce que quelqu'un va se rendre compte des nids de sacs à merde égoïstes que sont les prétendues petites entreprises dans ce pays ?
Quand est-ce que quelqu'un interpellera ces connards là-dessus ?
15. La Small Business Administration est une agence gouvernementale destinée à aider les petites entreprises de multiples façons, et particulièrement en accordant des prêts refusés par les banques.
De façon intéressante, au moment où j'écris, l'administration Bush a encore réduit le budget de l'Administration des petites entreprises15, la raison étant que les vrais acteurs ne sont pas si petits que ça, même au niveau du cartel local ou régional.
L'administration prend soin de ses contributeurs de campagne ; la junte néo-conservatrice est assez intelligente pour danser avec ceux qui l'ont emmenée
.
Inutile de gaspiller de l'argent avec une femme appelée Raynetta, qui a réussi à élever six gamins toute seule et essaye de monter une garderie dans notre quartier bronzé.
Ou de consentir un prêt à Bobby Copenhaver là-bas, à la limite de la ville, dans l'enfer des logements mobiles de beaufs, qui croit qu'il pourrait faire marcher un sacré bon atelier de carrosserie si seulement il avait le capital initial — ce ne sont pas des acteurs.
Alors les politiciens néo-conservateurs de la classe affairiste disent à Raynetta que les libéraux vont faire mettre des préservatifs à tous ses petits-enfants à l'école et à Bobby qu'une coalition urbaine (urbaine
étant le nom de code pour Afro-Américaine) va lui prendre le fusil hérité de son père.
Ça marche à tous les coups.
Comme les syndicats sont tous pourris
et les libéraux vont prendre vos fusils
marchait avec mon père.
Un récent jour d'hiver, après le long trajet de retour depuis la région de la capitale, je suis entré dans mon séjour où, pendant une fraction de seconde, j'ai vu mon père assis sur le canapé dans le scintillement de la télévision à manger des glaces dans le carton, tout comme il faisait quand j'étais gamin. Même une fraction de seconde est un temps long avec une apparition, une éternité qui défie notre notion même du temps. Après que les ondes électriques du choc ont cessé de traverser mon corps, je me suis assis sur le canapé et je me suis rappelé pourquoi je suis socialiste : si je peux faire ma part, aussi petite soit-elle, pour empêcher qu'un homme bien comme mon père se tue à rembourrer la poche d'un homme moindre, ou rendre sa dignité au travailleur aussi peu que ce soit, alors je le ferai. Et si je peux utiliser le seul fichu don que j'ai jamais eu — celui qu'il n'a jamais compris — en témoignant, alors je ferai cela aussi •